The New Face of Chinese Music: 19th international CHIME meeting

[:fr]Xavier Bouvier

Du 21 au 25 Octobre 2015, la Haute école de musique de Genève et l’Institut Confucius de l’Université de Genève accueillaient la 19e Conférence internationale de la CHIME Foundation for Chinese Music Research.

Fondée en 1990 par un groupe d’ethnomusicologues, de musicologues et d’afficionados de la musique chinoise, CHIME a tenu sa première réunion en 1991 à Genève, en coopération avec le European Seminar in Ethnomusicology (ESM) et les Archives internationales de musique populaires (AIMP). Après vingt-cinq années d’existence, CHIME est aujourd’hui le principal organe académique international traitant de cette thématique. La Fondation organise annuellement une conférence générale et plusieurs rencontres de taille plus limitée.

Intitulée The New Face of Chinese Music, la conférence 2015, à Genève, s’était donné comme ambition de tenter un inventaire critique de la situation actuelle de la musique en Chine. Un appel à contribution a permis de collecter plus d’une centaine de propositions d’intervenants, parmi lesquels un choix a été opéré par un comité de lecture, formé conjointement par des représentants de CHIME, de la HEM de Genève et de l’Institut Confucius. Au final, la conférence a accueilli plus de 120 participants, dont plus de la moitié d’origine chinoise.

La conférence était structurée en sessions et en panels organisés autour de diverses thématiques ; l’une des principales était la composition contemporaine en Chine. Plusieurs contributions se sont attaché à évoquer sous un angle historique l’émergence de la nouvelle musique en Chine dans les années 1920. Les processus d’insémination réciproques est-ouest ont été particulièrement décrits : emprunts culturels, transculturation – en particulier dans un panel dirigé par Chen Guangchen sur le traducteur Fu Lei – rôle joué par les institutions tels que les radios ou les orchestres, ou encore problématiques des échanges culturels dans le contexte d’importantes migrations de populations chinoises vers diverses parties du monde.

La question des positionnements esthétiques dans la composition contemporaine en Chine a donné lieu à des débats nourris lors de deux sessions spécifiques et d’une table ronde animée par le professeur Ulrich Mosch (musicologie, Université de Genève). Cette table ronde réunissait des compositeurs d’importance, tels que Lam Bunching, Wang Ying, Wen Deqing ou encore Zhou Long. Les discussions et débats témoignent du dynamisme de la création musicale contemporaine en Chine, et de la richesse du positionnement culturel de cette région du monde, disposant de racines musicales millénaires, très diverses culturellement, et simultanément plongée dans une modernité qu’elle investit pleinement.

L’évolution et l’adaptation des musiques et des formes théâtrales régionales traditionnelles ont été abordés lors de plusieurs sessions, en particulier dans un panel dirigé par Catherine Capdeville-Zeng portant sur la transformation des théâtres chinois et vietnamien. La capacité de ces répertoires à expérimenter de rapides transformations témoignent de leur versatilité et de leur adaptabilité.

Plusieurs contributeurs se sont attachés à des questions liées aux musiques populaires actuelles. Nimrod Baranovitch, en particulier, a montré comment de nouvelles thématiques en lien avec l’écologie apparaissent au sein des répertoires pop des minorités ethniques.

Entre les sessions, des courts interviews d’acteurs majeurs de la musique en Chine étaient projetées. Ces interludes, remarquablement réalisés par Frank Kouvenhoven, ont permis de prendre la pleine mesure de la diversité des problématiques, des positions et des opinions en jeu dans la Chine d’aujourd’hui.

Trois films ont été projetés : un remarquable documentaire était proposé en avant-première : Li Mansshan, portrait of a Folk Daoist de Stephen Jones ; dans son documentaire The Heart of Qin in Hong Kong, Maryam Goormaghtigh décrit avec poésie l’activité d’une société d’amateurs de guqin à Hong Kong. Enfin, le film de Frank Scheffer The Inner Landscape proposait un remarquable portrait du compositeur Guo Wenjing.

De nombreuses interventions musicales ont émaillé les conférences, parmi lesquelles il faut relever la prestation de la pipaiste Yu Lingling accompagnée par un quatuor formé d’étudiants de la HEM, des récitals de guqin, ainsi que deux concerts en soirée : le premier, tout en poésie, de Cai Yayi et son ensemble de Nanyin, et le second donné par l’ensemble Yi Jia Ren, une prestation emblématique de la manière dont les répertoires traditionnels  – ici celui des ensembles de musique de plein air – s’adaptent à la modernité contemporaine.

Une magnifique soirée organisée à l’Institut Confucius est venu clôturer ces journées, donnant à chacun des occasions de rencontres dans un cadre chaleureux.

Tenter, comme le proposait cette conférence, un inventaire de la situation de la musique en Chine à l’heure actuelle est une gageure, tant sont diverses et complexes les pratiques, les traditions, les genres, et les processus sociaux en œuvre. Cette thématique, interdisciplinaire par nature, a permis de favoriser des rencontres, sommes toutes assez rares, entre ethnomusicologues ou musicologues et les musiciens acteurs dans les processus créatifs contemporains, en particulier au sein des Conservatoires. Au final, de nombreuses interrogations auront émergé de cette rencontre. Un regret cependant : la question de l’éducation musicale, qui joue un rôle central dans la transmission et l’évolution des musiques, n’avait fait l’objet que de peu de propositions de contributions, et n’a pas pu trouver une place suffisante dans cette conférence. Le projet d’une prochaine conférence de CHIME sur cette thématique a été lancé.

BOUVIER, Xavier. « “The New Face of Chinese Music”: 19th international CHIME meeting ». In Blog Scientifique de l’Institut Confucius, Université de Genève. Lien permanent: https://ic.unige.ch/?p=784, consulté le 04/20/2024.[:en]Xavier Bouvier

Du 21 au 25 Octobre 2015, la Haute école de musique de Genève et l’Institut Confucius de l’Université de Genève accueillaient la 19e Conférence internationale de la CHIME Foundation for Chinese Music Research.

Fondée en 1990 par un groupe d’ethnomusicologues, de musicologues et d’afficionados de la musique chinoise, CHIME a tenu sa première réunion en 1991 à Genève, en coopération avec le European Seminar in Ethnomusicology (ESM) et les Archives internationales de musique populaires (AIMP). Après vingt-cinq années d’existence, CHIME est aujourd’hui le principal organe académique international traitant de cette thématique. La Fondation organise annuellement une conférence générale et plusieurs rencontres de taille plus limitée.

Intitulée The New Face of Chinese Music, la conférence 2015, à Genève, s’était donné comme ambition de tenter un inventaire critique de la situation actuelle de la musique en Chine. Un appel à contribution a permis de collecter plus d’une centaine de propositions d’intervenants, parmi lesquels un choix a été opéré par un comité de lecture, formé conjointement par des représentants de CHIME, de la HEM de Genève et de l’Institut Confucius. Au final, la conférence a accueilli plus de 120 participants, dont plus de la moitié d’origine chinoise.

La conférence était structurée en sessions et en panels organisés autour de diverses thématiques ; l’une des principales était la composition contemporaine en Chine. Plusieurs contributions se sont attaché à évoquer sous un angle historique l’émergence de la nouvelle musique en Chine dans les années 1920. Les processus d’insémination réciproques est-ouest ont été particulièrement décrits : emprunts culturels, transculturation – en particulier dans un panel dirigé par Chen Guangchen sur le traducteur Fu Lei – rôle joué par les institutions tels que les radios ou les orchestres, ou encore problématiques des échanges culturels dans le contexte d’importantes migrations de populations chinoises vers diverses parties du monde.

La question des positionnements esthétiques dans la composition contemporaine en Chine a donné lieu à des débats nourris lors de deux sessions spécifiques et d’une table ronde animée par le professeur Ulrich Mosch (musicologie, Université de Genève). Cette table ronde réunissait des compositeurs d’importance, tels que Lam Bunching, Wang Ying, Wen Deqing ou encore Zhou Long. Les discussions et débats témoignent du dynamisme de la création musicale contemporaine en Chine, et de la richesse du positionnement culturel de cette région du monde, disposant de racines musicales millénaires, très diverses culturellement, et simultanément plongée dans une modernité qu’elle investit pleinement.

L’évolution et l’adaptation des musiques et des formes théâtrales régionales traditionnelles ont été abordés lors de plusieurs sessions, en particulier dans un panel dirigé par Catherine Capdeville-Zeng portant sur la transformation des théâtres chinois et vietnamien. La capacité de ces répertoires à expérimenter de rapides transformations témoignent de leur versatilité et de leur adaptabilité.

Plusieurs contributeurs se sont attachés à des questions liées aux musiques populaires actuelles. Nimrod Baranovitch, en particulier, a montré comment de nouvelles thématiques en lien avec l’écologie apparaissent au sein des répertoires pop des minorités ethniques.

Entre les sessions, des courts interviews d’acteurs majeurs de la musique en Chine étaient projetées. Ces interludes, remarquablement réalisés par Frank Kouvenhoven, ont permis de prendre la pleine mesure de la diversité des problématiques, des positions et des opinions en jeu dans la Chine d’aujourd’hui.

Trois films ont été projetés : un remarquable documentaire était proposé en avant-première : Li Mansshan, portrait of a Folk Daoist de Stephen Jones ; dans son documentaire The Heart of Qin in Hong Kong, Maryam Goormaghtigh décrit avec poésie l’activité d’une société d’amateurs de guqin à Hong Kong. Enfin, le film de Frank Scheffer The Inner Landscape proposait un remarquable portrait du compositeur Guo Wenjing.

De nombreuses interventions musicales ont émaillé les conférences, parmi lesquelles il faut relever la prestation de la pipaiste Yu Lingling accompagnée par un quatuor formé d’étudiants de la HEM, des récitals de guqin, ainsi que deux concerts en soirée : le premier, tout en poésie, de Cai Yayi et son ensemble de Nanyin, et le second donné par l’ensemble Yi Jia Ren, une prestation emblématique de la manière dont les répertoires traditionnels  – ici celui des ensembles de musique de plein air – s’adaptent à la modernité contemporaine.

Une magnifique soirée organisée à l’Institut Confucius est venu clôturer ces journées, donnant à chacun des occasions de rencontres dans un cadre chaleureux.

Tenter, comme le proposait cette conférence, un inventaire de la situation de la musique en Chine à l’heure actuelle est une gageure, tant sont diverses et complexes les pratiques, les traditions, les genres, et les processus sociaux en œuvre. Cette thématique, interdisciplinaire par nature, a permis de favoriser des rencontres, sommes toutes assez rares, entre ethnomusicologues ou musicologues et les musiciens acteurs dans les processus créatifs contemporains, en particulier au sein des Conservatoires. Au final, de nombreuses interrogations auront émergé de cette rencontre. Un regret cependant : la question de l’éducation musicale, qui joue un rôle central dans la transmission et l’évolution des musiques, n’avait fait l’objet que de peu de propositions de contributions, et n’a pas pu trouver une place suffisante dans cette conférence. Le projet d’une prochaine conférence de CHIME sur cette thématique a été lancé.

BOUVIER, Xavier. « “The New Face of Chinese Music”: 19th international CHIME meeting ». In Blog Scientifique de l’Institut Confucius, Université de Genève. Lien permanent: https://ic.unige.ch/?p=784, consulté le 04/20/2024.[:]